L’esprit de Nant de Drance

Berne, 09.09.2022 - Discours de la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga à Finhaut (Valais)

(La parole prononcée fait foi)

 

Monsieur le Président du Conseil d’Etat valaisan,
Monsieur le Président de Finhaut,
Monsieur le Président du conseil d’administration
Mesdames et Messieurs les représentants des autorités politiques fédérales, cantonales et communales,
Chère Lynn,
Cher Théo,
Mesdames et Messieurs,

Quand on commence, avec les Valaisans, on ne peut plus s’arrêter.
J’étais ici même au début de l’été, dans cette cathédrale souterraine au service de l’énergie, au service des gens, au service du pays.
Je suis revenue en Valais le 31 juillet, à l’autre bout du canton, à Saas-Balen. Pour une merveilleuse fête nationale.
Et : je reviendrai le mois prochain, à Brigue, où j’ai invité les ministres de l’environnement et des transports des pays alpins. Parce que nos pays sont tout particulièrement touchés par le dérèglement climatique, parce que nous voulons, pour l’atténuer, faire œuvre de pionniers.
Comme vous ici, pionnières et pionniers du Valais et acteurs de l’énergie hydraulique.

Je sens beaucoup d’émotion aujourd’hui devant le travail accompli.
Et c’est bien pour vous remercier du fond du coeur, vous qui avez dessiné, calculé, construit et travaillé sous terre pour réaliser ce gigantesque ouvrage que je suis avec vous aujourd’hui. Je vous remercie de la part du Conseil fédéral et de la part de la Suisse tout entière.
Notre pays et nos voisins ont besoin de gens comme vous, des faiseurs qui trouvent des solutions, notamment avec les défenseurs de la nature.
Unir pour progresser : c’est dans cet esprit - que j’appellerais l’esprit de Nant de Drance - que j’ai invité la branche, les ONG et les cantons à la table ronde sur l’énergie hydraulique.
Ces représentants d’intérêts fort différents se sont mis d’accord sur quinze projets concrets de barrages prioritaires. Des projets qui répondent à des critères de production et de protection de l’environnement. D’ailleurs, huit d’entre eux se trouvent dans ce canton.
Nous nous inspirons du Valais, voyez-vous. Car sans vous, pas de tournant énergétique.

Vous aviez déjà révolutionné le pays avec l’énergie hydraulique, qui a permis d’électrifier nos chemins de fer après la Première Guerre mondiale, puis la Seconde.
Tant et si bien qu’aujourd’hui, les trains des CFF roulent à 90% avec de l’énergie hydraulique. C’est une fierté pour moi, je le raconte partout à l’étranger. Les CFF sont d’ailleurs copropriétaires de la centrale que nous inaugurons, comme vous le savez.

Nous avons besoin de vous tous, ici présents.
-    Parce que l’usage de l’eau pour produire du courant est le pilier central de notre approvisionnement en électricité.
-    Parce que, des bisses aux barrages, vous êtes des virtuoses de l’eau. Peut-être parce que vous êtes aussi des virtuoses de la survie.

Ici, dans la vallée du Trient, tout en pentes raides et escarpées, rares étaient les terrains plats à cultiver. On travaillait à la main, et, rapport aux bêtes, pas grand-chose à brouter.

Ici, comme dans d’autres vallées alpines, la vie a été un combat permanent des siècles durant. Qui a forcé de nombreux Suisses à émigrer.
Mais la roue a tourné.
Ou devrais-je dire : la turbine?

La Suisse a besoin du savoir-faire de celles et ceux qui construisent les centrales, de leur profonde connaissance de la montagne et de la physique.
Cette année plus que jamais, la force de l’eau nous permet de faire des réserves et de produire cette électricité dont nous avons grand besoin.
Un ouvrage comme celui de Nant de Drance joue et jouera un rôle essentiel pour stabiliser le réseau électrique suisse et européen. Par sa capacité de stockage et de production rapide, il est une contribution majeure à la sécurité de l’approvisionnement de la Suisse.

D’autant plus qu’il nous faut absolument négocier notre virage vers une économie respectueuse du climat.
Ce n’est pas aux Valaisannes et Valaisans que je dois faire un dessin. Vous qui observez le recul du Glacier du Trient. Quand j’étais jeune, il permettait aux alpinistes débutants de faire leurs premières expériences sur un glacier à quelque 1200 mètres d’altitude, à côté de la buvette. Aujourd’hui il faut monter à plus de 2300 mètres pour trouver de la glace.
Et les randonneurs d’aujourd’hui se demandent : mais pourquoi ont-ils mis la buvette à une heure de marche du glacier ?

Il y a l’urgence climatique, donc.
A laquelle est venue s’ajouter la crise énergétique mondiale, avec l’Europe comme épicentre.
Notre dépendance aux énergies fossiles est toxique; elle nous rend vulnérables.
Le dirigeant de la Russie le sait, lui qui a déclenché une guerre sur notre continent avant de fermer le robinet du gaz à ceux qui ont osé réagir.
Ceux qui misaient tout sur l’importation de pétrole et de gaz sont face à un cuisant échec.

La situation actuelle nous rappelle à quel point la production d’énergie renouvelable dans notre pays est vitale.

J’en ai toujours été convaincue.
C’est pourquoi, dès mon arrivée dans ce département, j’ai pris le taureau par les cornes. Nous avons:
-    prolongé les aides aux énergies renouvelables pour assurer une sécurité d’investissement à l’économie et à la branche électrique,
-    nous avons accéléré le tempo, allégé la bureaucratie, réduit les possibilités de multiplier les recours. Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre vingt ans jusqu’à ce qu’un projet voie le jour !
-    Nous avons facilité le boom actuel du solaire: en permettant l’installation de panneaux solaires sur les toits sans autorisation, et en mettant gratuitement à disposition les parois antibruit et les murs qui bordent les routes nationales.

La commission de l’énergie du Conseil des Etats vient de décider qu’il fallait
des panneaux solaires sur chaque nouvelle construction ;
et une base juridique qui autorise de grandes installations solaires dans les Alpes.

La commission veut faire passer ces mesures au parlement par droit d’urgence.
Je suis ravie qu’elle-aussi, accélère le tempo en faveur des énergies renouvelables !

Pourtant, avec la guerre et la situation extraordinaire qui en découle, nous ne pouvons pas exclure une pénurie. Même si nous faisons tout pour l’éviter.
L’énergie est limitée. D’autant plus
-    que le manque d’eau a entravé la navigation sur le Rhin, et donc l’acheminement de pétrole vers notre pays.
-    Et que la moitié des centrales nucléaires françaises sont à l’arrêt.

Mais il serait vain de se plaindre, et même indécent envers les victimes de la guerre.
Il faut agir, encore, et vite.

Le Conseil fédéral a tout fait, ces derniers mois, pour que notre pays soit le mieux préparé possible, tout spécialement en prévision de l’hiver à venir.
-    Le Conseil fédéral a décidé la constitution d’une réserve hydraulique qui puisse fournir, si nécessaire, de l’électricité à la fin de l’hiver, quand les réserves habituelles sont au plus bas;
-    Pour avoir davantage de sécurité, nous avons encore planifié d’autres centrales de réserve. Et il y a une semaine, mon département a signé un contrat pour l’acquisition de huit turbines mobiles. Celles-ci fonctionnent au gaz, mais aussi au pétrole ou à l’hydrogène. Nous en disposerons dès la période critique de la fin de l’hiver.
-    Côté finances, le Conseil fédéral a fait de la prévention également : il a préparé un mécanisme de sauvetage destiné au secteur de l’électricité. Nous avons présenté une loi urgente au parlement. Cette semaine, le Conseil fédéral a activé ce mécanisme de sauvetage pour Axpo et accordé à l’entreprise un crédit de quatre milliards de francs pour affronter d’éventuels manques de liquidités.

Toutes ces mesures ont UN but : le Conseil fédéral veut renforcer l’approvisionnement en énergie de notre pays. C’est primordial pour les gens et pour l’économie.
Nous nous engageons de toutes nos forces dans ce but.
J’ai d’ailleurs la chance d’avoir un directeur de l’Office de l’énergie qui vient de chez vous, d’un village situé aux portes de cette vallée. Lui et son équipe – je peux vous l’assurer - se battent pour le bien commun: ils y passent des jours, ils y passent des nuits.
Je leur en suis très reconnaissante.
Mais chacune et chacun de nous peut agir : responsables politiques, entreprises, individus. N’attendons pas !

C’est pourquoi le Conseil fédéral, de concert avec les cantons et les milieux économiques, a lancé une campagne d’information pour mettre fin au gaspillage de l’énergie.

Pour finir, je vous propose de regarder au-delà de nos vallées et nos montagnes.

Vous le savez, depuis des années la Suisse souhaite conclure un accord sur l’électricité avec l’Union européenne. Cela faciliterait notre collaboration, c’est sûr.

Mais cela ne changerait rien au fait que nous devons faire nos devoirs: c’est à nous d’investir un maximum dans notre pays et dans les énergies renouvelables.

Inspirons-nous de l’esprit de Nant de Drance !


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